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La toile a chauffé en cette soirée du lundi 21 Novembre au Théâtre National pour ce 5ème jour du Festival des Libertés! En effet ce n’est pas moins de trois documentaires qui nous sont présentés à la salle J. Huisman.

Trois sujets différents, trois styles et trois approches se rassemblant pourtant en une base commune: les dérives d’une société inadaptée à ceux qui vivent en elle et par elle; et toujours cette même passion dans les images, les témoignages ou les analyses.

Le premier documentaire qui nous est proposé se nomme Green et a été réalisé par Patrick Rouxel en 2009 et étalant un palmarès impressionnant: Golden Panda Award & Natural history Museum Environment Award, Wildscreen Film Festival (UK), 2010 •Grand teton Award & Best conservation Program, Jackson hole Wildlife Film Festival (USA), 2009.

Petite présentation:

Synopsis: Son nom est Green, une femelle orang-outan, seule dans un monde qui ne lui appartient plus. C’est un voyage bouleversant à travers les yeux et les sentiments de l’un des derniers grands singes de Bornéo. Un témoignage puissant sur les ravages de la déforestation, sur les responsabilités de l’industrie et des consommateurs. Une oeuvre rare et originale qui modifie pour longtemps le regard que nous portons sur la nature et notre société.

Véritable ode à la nature, ce long métrage nous offre un contraste saisissant entre la tranquillité de la nature et le chaos et la destruction que les hommes y apportent. Se servant à merveille d’une musique tantôt douce et tranquille pour se muer en saccades crispées, Rouxel nous emmène dans un monde verdoyant dans lequel la nature mène un combat inégal contre une déforestation et une surconsommation de ses richesses.

Au fur et à mesure que le film se déroule, une analogie est faite entre la maladie de Green -l’orang-outan malade- et son habitat, lui aussi malade d’un virus nommé l’homme.

La principale thématique adoptée est l’inadaptation du règne animal à un milieu qui n’est pas (ou plus) son milieu naturel, dû à toutes les transformations qui y sont opérées, c’est donc ici la liberté de la nature qui est bafouée, ses droits piétinés.

La séquence de fin nous renvoie à celle du début, nous faisant comprendre que tout cela n’est qu’un éternel recommencement qui ne s’achèvera que dans la destruction de ce qui fait notre vie.

Malgré une manière de filmer se rapprochant parfois de l’amateurisme, (mais donnant l’impression d’être voulue) Rouxel arrive à nous plonger sans aucuns dialogues dans son monde et à nous faire partager ses émotions sur le sujet tout en douceur et en poésie. On pourra juste regretter le manichéisme parfois simpliste dont il fait preuve mais n’est-ce pas nécessaire pour faire évoluer les mentalités?

Changement radical de sujet avec A l’ombre de la République (2010) réalisé par Stéphane Mercurio qui nous emmène dans le milieu carcéral français.

Synopsis: Pour la première fois en France, le Contrôle Général des Lieux de Privation de Liberté accepte qu’une équipe de tournage le suive dans son travail d’inspection des droits fondamentaux dans les prisons, hôpitaux psychiatriques, commissariats. La face cachée de nos démocraties…

Et le moins que l’on puisse dire est que Stéphane Mercurio atteint son but ici: amener les gens à se questionner sur notre système carcéral.

Rassemblement de nombreux témoignages receuillis par le Contrôle Général des Lieux de Privation de Liberté, la caméra se fait ici discrète, s’efface pour laisser place aux protagonistes déambulant dans un milieu qui nous est inconnu malgré nos convictions sur celui-ci.

Inégalités des détenus, travail presque pas rémunéré (certains prononceront le mot « esclavage »!), brimades des gardiens, conditions de vies déplorables, non respect de l’application des peines,…

Tout cela, c’est le quotidien de milliers de détenus en France et partout ailleurs. De l’hôpital psychiatrique de Navarre à la Prison Saint Martin de l’île de Ré en passant par le centre pénitentiaire de Bourg-en-Bresse, ces prisonniers expriment leur ras-le-bol a Jean-Michel Delarue (pas celui de la télévision bien sûr) et à son équipe. Certains ne sont payés que 6 euros la semaine, d’autres purgent des peines démesurées mais tous sont unanimes: à travers la belle façade de réinsertion et de respect que le monde politique offre au monde extérieur, l’intérieur n’est pas rose.

Les paroles de personnes condamnées à la perpétuité à la prison de Saint Martin de l’île de Ré nous amènent même à nous poser des questions quant à la pertinence de notre système carcéral. Car les peines sont parfois trop longues, disproportionnées par rapport aux possibilités de réinsertions d’un individu, pour paraphraser un détenu de cette prison, après un certain moment, l’espoir s’est envolé en même temps que leur humanité, il ne reste alors plus que des fauves.

Filmé avec brio, ce documentaire touche dans le mille sans verser dans le « choc » et le pathétique, il nous offre un point de vue -certes unique- de ce milieu décrié. Plus de témoignages de gardiens auraient cependant été les bienvenus afin d’offrir un autre point de vue.

Enfin, la soirée était clôturée par Tiananmen: 20 years after the massacre. The victims tell their story (2009) réalisé par Thomas Weidenbach et Shi Ming précédé du court-métrage drôle et engagé de Barham Sadeghi: Congratulations for China : Nobel Peace Prize 2010 qui fit l’unanimité dans la salle par son insolence, son ironie et son culot, un pur moment de détente donc avant ce qui allait suivre.

Synopsis: Printemps 1989, Hu Yaobang, un dirigeant communiste chinois décède. Les jeunes se rassemblent un peu partout dans les villes de Chine et commencent à parler librement de démocratie et de réformes politiques. Un vent d’espoir souffle sur la jeunesse. Pourtant, le 4 juin, la répression se fera dans le sang avec de 300 à 3 000 morts selon les estimations.

Ici, l’œuvre se révèle plus informative et éducative qu’artistique ou novatrice, elle n’apporte rien de nouveau au débat mais émeut et captive par son mélange de témoignages et d’images d’archives savamment orchestrés afin de retracer les faits qui se déroulèrent du 16 avril au 5 juin 1989.

La parole est donnée principalement à Hang Donfeng -un leader du mouvement syndical chinois créé à ce moment là et surnommé le Lech Walesa chinois- et à Zhang Jian -un des leaders estudiantins- qui nous racontent les faits, loin de toute la propagande du gouvernement chinois.

Ces étudiants et citoyens qui n’ont jamais voulu qu’ouvrir un dialogue constructif avec un gouvernement fermé afin de garantir plus de liberté au peuple n’ont eu que des balles en retour et malgré les quelques jours d’effervescence qui régnèrent sur la Place Tienanmen avec notamment l’organisation de plusieurs concerts, le pouvoir répressif et totalitaire finit par l’emporter, emportant en même temps la vie d’entre 300 et 3000 manifestants.

Ces soldats qui pleurent pendant qu’ils tirent sur le peuple et ces familles qui réclament toujours de savoir où leur fils a été enterré, tout cela ne peut nous laisser indifférent.

Un documentaire à montrer dans les écoles chinoises dans quelques (nombreuses?) années, afin que les erreurs du passé ne soit pas reproduites.

En définitive, ces trois long métrages bien que diamétralement différents nous offrent autant de combats pour la liberté et la dignité.

Et pour conclure:

« Ma seule liberté est de rêver alors je rêve de liberté » (Benoît Granger)

Olivier Eggermont


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